Chassons.com – Sécurité à la chasse, les premiers concernés, nos armuriers

Chassons.com – Sécurité à la chasse, les premiers concernés, nos armuriers

Article du site Chassons.com paru en septembre 2019

Alors que la chasse est déjà ouverte dans plusieurs départements, les chasseurs en ont profité ces dernières semaines pour vérifier leurs armes et régler leurs optiques. D’autres ont choisi cette nouvelle ouverture pour changer de canon de calibre et de munitions. Cette période est donc primordiale pour les armuriers français qui œuvrent en boutique et dans les ateliers. Alors que la chasse est de plus en plus attaquée par les antis, nous avons souhaité en savoir plus sur cette profession qui permet à des milliers de français de vivre et de faire perdurer cet artisanat français. Pour cela, nous avons ainsi échangé avec Bertille Seive à la tête de la Fédération Professionnelle des métiers de l’Arme et de la Munition de chasse et de tir.

Bertille, la chasse vient d’ouvrir mais avant cette date fatidique de nombreux armuriers ont travaillé tout l’été. Comment devient-on armurier et à partir de quel âge, est-il possible de détenir une armurerie à son nom ?
Plusieurs parcours permettent de devenir armurier au sein de trois organismes. Le lycée Benoît Fourneyron (Saint-Etienne) et le CES Léon Mignon de Liège sont les deux établissements disposant d’une section armurerie et qui forment au métier technique d’armurier. Ces formations sont, par circonstances plutôt réservées aux jeunes et pouvant s’intégrer à la sortie du collège ou du lycée.  Toutefois, il n’y a pas d’âge pour une reconversion professionnelle. La FEPAM dispense une une formation réglementaire  sur 140 heures et forme chaque année jeunes et « moins jeunes » en reconversion professionnelle. Ainsi, les personnes désireuses de reprendre ou d’ouvrir une armurerie sont formées à la FEPAM et réalisent leur projet. Pour devenir dirigeant d’une armurerie, il faut avoir 18 ans, être honorable et posséder la compétence reconnue.

Légalement, tout le monde peut-il devenir armurier ?
Tout dépend de la définition donnée au mot « armurier ». L’armurier technicien aura des compétences spécifiques (travail du bois / métal…), aura un profil plus créateur ou réparateur, cela dépend. L’armurier au sens juridique du terme est le dirigeant de l’armurerie en elle-même. Les exigences pour devenir armurier dans ce sens (et cela est obligatoire) est l’obtention d’un arrêté préfectoral d’agrément d’armurier :

Il est délivré sur justification de compétences professionnelles, principalement réglementaires, qui sont apportées par :
– le diplôme d’une école d’armurerie, comme Sain- Etienne ou Liège
– le CQP CAM (Certificat de Qualification professionnelle Commerce Armes et Munitions), qui s’obtient via le centre de formation FEPAM.

L’agrément d’armurier, nécessaire à la reprise ou l’ouverture d’un commerce, s’obtient sous réserve d’honorabilité. 

Liège ou Saint-Etienne, en combien de temps un élève devient-il armurier ? Comment se déroule la scolarité (contrôle continu ou examen final), quel est le taux de réussite ?
Le nombre d’années est variable, de un à trois ans au lycée Benoît Fourneyron à Saint-Etienne (42), le CAP se déroule sur une année et le Brevet des Métiers d’Art s’étale sur deux  ans. Généralement, pour  devenir un armurier « complet », les étudiants vont au bout du BMA (Brevet des Métiers d’Arts). Pour intégrer le CAP armurerie, il est indispensable d’être diplômé d’autres CAP, de type «conduite de systèmes industriel production et transformation des métaux », « Opérateur Régleur en décolletage » ou « Ébéniste ».

Le CES Léon Mignon de Liège dure de trois à cinq ans, la formation est plus longue mais sans prérequis et peut se démarrer directement après la troisième si l’on veut.  Ce lycée enseigne également l’apprentissage de la gravure. Il est également possible  de suivre via la FEPAM, la formation de 140 heures sans prérequis et permettre ainsi à toute personne ayant toujours rêvé de tenir une armurerie d’obtenir un des diplômes reconnu par le Ministère de l’Intérieur.

Florent VIALE – Artiste graveur – viale.florent@orange.fr

L’armurier est le premier garant de la sécurité à la chasse. Ne trouvez-vous pas parfois que la profession ne soit pas suffisamment mise en avant ?
Tout à fait. En tant que Fédération professionnelle, la FEPAM s’efforce de promouvoir l’armurerie afin de préserver ce savoir-faire séculaire, nous nous sommes également rendus compte du manque de communication à ce sujet en raison du nombre de personnes intéressées par la filière mais ne sachant comment l’intégrer. C’est pour cette raison que la FEPAM a crée le Pôle Formations Armuriers et présente toutes les écoles armurières lors du Game Fair en Juin à Lamotte Beuvron et ce depuis 3 ans.

On trouvait il y a encore quelques années des armes au sein de grandes surfaces, désormais, uniquement en armurerie. Cela signifie-t-il que la profession est totalement encadrée et beaucoup plus sécurisée que dans d’autres pays ?
La création d’un agrément d’armurier depuis le 8 novembre 2011, est apparue au premier abord comme contraignant. Mais au final la profession se sent aujourd’hui plus renforcée. S’agissant de la disparition des ventes d’armes en grande surface c’est le choix unique de ces structures.

Autrefois, les sangliers courants et les simulateurs de tir n’existaient pas. Aujourd’hui le chasseur aime tester et s’entraîner. Les armuriers sont en quelque sorte les premiers prescripteurs de la sécurité à la chasse. Ne pensez-vous pas que ces derniers pourraient proposer des formations sécurités avec le soutien de la FNC ou l’ANCGG ?
La sécurité est aujourd’hui la première préoccupation de l’action de chasse. Le passage du permis est désormais plus orienté sécurité en action de chasse et manipulation des armes. Au début de chaque chasse en groupe, le président est tenu de rappeler des consignes indispensables au bon déroulement de la journée ! Que ce soit à Liège ou à Saint-Etienne et même à la FEPAM qui propose pourtant une formation réglementaire et non technique, ces établissements enseignent la manipulation des armes en sécurité avec un niveau d’exigences fort et intransigeant.

Au-delà du fait de dispenser des formations, qu’elles soient obligatoires ou facultatives, sensibiliser au risque doit toucher tout le monde et non uniquement les personnes assistant aux formations. Ainsi, chaque armurier, moniteur de sanglier courant ou de cinétir, est apte et ambassadeur de la sécurité dans la pratique de la chasse ou du tir. L’armurier professionnel sera en mesure de relayer cette exigence auprès de son client, essentiellement au niveau des manipulations de son arme mais aussi au niveau de son entretien (contrôle des canons non obstrués, vérification en cas de chute, direction de l’arme, déchargement de celle-ci…).

Pour les armuriers ayant la possibilité d’être équipé d’un sanglier courant ou d’un simulateur de tir, il est évident (et pas uniquement lors de l’ouverture de la chasse) qu’organiser des séances de tir renforce les gestes réflexes de sécurité autour de l’arme du chasseur, grâce aux observations et conseils de l’armurier. Bien évidemment des partenariats de la FNC ou de l’ANCGG ne peuvent être que les bienvenus.

Vous qui êtes au contact des élèves et des armuriers. Est-il mensonger de dire que la nouvelle génération (celle qui a passé le permis) est plus préparée/sécurisée qu’autrefois ?
Le permis a su évoluer avec son temps et, afin de toujours limiter les accidents de chasse, celui-ci a augmenté au fil des ans les exigences autour de la sécurité (pour soi et les autres) en plus de la connaissance cynégétique. L’évolution du nombre d’accident de chasse en est la preuve. D’autres facteurs que le permis de chasser entrent en jeu mais il est certain que ce nouveau permis a eu un impact sur les accidents de chasse.

Quel est votre souhait pour votre profession, les générations futures et la chasse en général ?
Ce que la FEPAM s’efforce de faire et continuera au cours des années à venir est de promouvoir encore et toujours la filière armurerie. Depuis trois ans, la FEPAM relève le challenge de réunir le CES Léon Mignon de Liège et le lycée Benoît Fourneyron au sein du stand « Pôle Formations Armuriers » au Game Fair. De nombreux visiteurs s’informent chaque année et découvre cette filière, qui recrute et se développe. Les élèves de ces écoles y font l’apprentissage de la communication avec le grand public.  Notre plus grand souhait est de continuer à communiquer, rendre l’information à ces métiers plus accessibles et valoriser ces savoir-faire divers et variés au sein de l’armurerie.

Ces métiers sont des « métiers passion » et nous sommes très agréablement surpris de constater que toujours autant de jeunes et « moins jeunes » ont envie de s’investir dedans. La chasse évolue, devient éco-responsable, partenaire de l’environnement et de son équilibre. Tout cela demande beaucoup de pédagogie à l’attention de ceux qui se « bloquent » le plus souvent car méconnaissent le sujet et ne sont jamais venu le « côtoyer » et le vivre de l’intérieur pour le comprendre. A nous d’aller vers eux !